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L’OMBRE DE L’AMOUR

L’inconnue avait clos ses paupières à demi.

Max se demanda si elle avait écouté.

S’il avait su !

Elle se mordait les lèvres pour ne pas parler, pour ne pas lui dire qu’elle était Régine et qu’elle avait posé autrefois pour cette statue où les amoureux du pays faisaient à présent des pèlerinages. Max renaissait dans son souvenir, tel que Pierre lui en avait parlé. Elle avait toujours regretté de ne pas l’avoir rencontré…

Qu’avait-elle cherché dans les palaces et les trains ? Au cours de cette vie errante, cette vie de luxe et d’inaction qui lui pesait, parfois, sans qu’elle voulût se l’avouer, que poursuivait-elle ? Était-ce lui, sans le savoir ? Elle n’avait rien trouvé d’autre que le souvenir d’un amour défunt et celui d’êtres qui n’avaient pas su la retenir.

Mais il était trop tard.

Elle n’avait plus à lui offrir que l’ombre de cet amour qu’il éprouvait pour celle qu’elle avait été.

Alors, elle se leva, fit une brève inclinaison de la tête et partit. Des larmes restaient suspendues à ses cils recourbés.

Pour la première fois, Max douta.

— Peut-être mon histoire est-elle extravagante, impossible ?… Peut-être ai-je cru aimer seulement ?

Et, tandis que Régine marchait droit devant elle, lourde de cet amour dont elle avait reçu le don merveilleux, Mac sentit le poids de la solitude l’oppresser soudain…