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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

— Vas-y, dit le régisseur à celle-ci en même temps qu’il appuyait sur les boutons qui commandaient les électriciens placés derrière les projecteurs disposés dans la salle à hauteur du deuxième balcon.

Ruby s’élança, aussitôt happée par les pinceaux conjugués des projecteurs. Un cache-sexe de strass et deux cabochons sur la pointe des seins soulignaient sa nudité blanche, tandis que de longues plumes fixées à sa ceinture, à ses épaules, et une haute aigrette fichée dans ses cheveux devaient faire comprendre au public qu’elle était l’oiseau d’un merveilleux pays de rêve.

Survenait Liliane étroitement moulée dans un maillot d’argent et qui portait arc et carquois pour ne point laisser ignorer qu’elle était le chasseur. Celui-ci découvrait l’oiseau qui à sa vue s’affolait, tournoyait sur lui-même, puis quand le chasseur plaçait sa flèche sur son arc, suppliait, implorait grâce.

Vainement. Le chasseur l’ajustait. Alors se redressant, elle offrait aux coups son entière beauté, la splendeur de son corps.

Le chasseur hésitait. Alors autour de lui l’oiseau bondissait en une danse effrénée et provocante. Le chasseur au loin jetait son arc, cherchait à saisir dans ses mains tendues l’oiseau qui se dérobait, feignait de se laisser approcher pour mieux fuir au dernier moment.