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LES QUATRAINS DE KHÈYAM.


317

Présentez le salut de ma part à Khèyam, et ensuite dites-lui : « Ô Khèyam ! tu es un ignorant. Quand donc ai-je dit que le vin est « défendu ? Il est licite pour les hommes intelligents, il n’est défendu s que pour les ignorants. »


318

Ô toi qui convoites nuit et jour les biens de ce monde ! tu ne réfléchis donc pas au jour terrible[1] ? Prends en considération ton dernier souffle, reviens à toi, et regarde comme le temps traite les autres.


319

Ô toi qui es le résumé de la création universelle[2] ! cesse donc un instant de te préoccuper de gain ou de perte ; prends une coupe de vin, de la main de l’échanson éternel[3], et affranchis-toi ainsi à la fois et des soucis de ce monde et de ceux de l’autre !


320

Si tu sais à quoi t’en tenir sur la marche de ce cercle sans fin[4], tu dois reconnaître deux classes d’hommes : ceux qui connaissent parfaitement son bon et son mauvais côté, et ceux qui n’ont de notion ni d’eux-mêmes ni des choses d’ici-bas.


321

Rends léger à mon cœur le poids des vicissitudes de ce monde. Cache aux humains mes actions répréhensibles. Rends-moi heureux aujourd’hui, et demain fais-moi ce que tu croiras digne de ta miséricorde.

  1. Allusion ironique au jour de la résurrection, auquel les moullahs musulmans ne songent pas assez, puisqu’ils s’attachent aux biens d’ici-bas. (Voyez le Koran, chapitre Le jour véritable. Voyez aussi les chapitres La rupture, Les ténèbres, Les ministres de la vengeance, où sont décrites les horreurs de ce jour suprême et les délices du paradis.)
  2. Cette épithète désigne l’homme considéré comme microcosme.
  3. C’est une figure allégorique par laquelle les poëtes orientaux aiment à désigner la Divinité puisant dans la coupe de la création la vie de tous les êtres, Voyez ci-dessous, quatrain 341, où le poëte dit : « Le jour où l’on a distribué le vin de l’amour, ce vin de l’amour divin, de la vie, on a puisé ma portion dans le sang de mon cœur. »
  4. Le firmament, la roue des cieux.