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LES

QUATRAINS DE KHÈYAM.

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1

Un matin, j’entendis venir de notre taverne une voix qui disait : À moi, joyeux buveurs, jeunes fous ! levez-vous, et venez remplir encore une coupe de vin, avant que le destin vienne remplir celle de notre existence.


2

Ô toi qui dans l’univers entier es l’objet choisi de mon cœur ! toi qui m’es plus chère que l’âme qui m’anime, que les yeux qui m’éclairent ! il n’y a rien, ô idole, de plus précieux que la vie : eh bien ! tu m’es cent fois plus précieuse qu’elle[1].


3

Qui t’a conduite cette nuit vers nous, ainsi prise de vin ? Qui donc, enlevant le voile qui te couvrait, a pu te conduire jusqu’ici ? Qui enfin t’amène aussi rapide que le vent pour attiser encore le feu de celui qui brûlait déjà en ton absence[2] ?

  1. Bien que l’absence de la distinction des genres dans la langue persane puisse autoriser à émettre des doutes sur cette question de savoir si ce quatrain doit être considéré comme mystique, il est cependant certain que le poëte s’adresse ici à la Divinité, qu’il qualifie de l’épithète d’idole, et non à sa maîtresse.
  2. Le poëte donne un sens complet, dans les deux derniers hémistiches du quatrain, par le seul rapprochement des deux mots vent et feu, sens qu’en français on ne saurait rendre, ce me semble, sans avoir recours à une périphrase, comme j’ai cru devoir le faire. Des cas semblables se présentent dans la suite.