Page:Niemcewicz - Notes sur ma captivité à Saint-Pétersbourg.djvu/214

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
187
ÉLARGISSEMENT.

tendrissement, soit passage subit du silence de la prison au bruit de la société, j’avais l’air d’un imbécile ; étonné de tout, je cherchais les paroles et pouvais à peine les trouver ; un petit air de piano me faisait pleurer. J’ai revu surtout avec des larmes de joie, les jeunes princes Czartoryski, Adam et Constantin, fils de celui qui m’a toujours témoigné tant d’intérêt et d’amitié. Ces deux jeunes gens, élevés dans les principes les plus purs de la vertu et de l’amour de la patrie, avaient été forcés, sous le dernier règne, de venir à Pétersbourg solliciter la restitution des biens immenses qu’on avait confisqués à leur père. Ils les recouvrèrent en grande partie, mais furent obligés de rester, comme otages, auprès de la personne de l’impératrice. Tous deux furent faits officiers dans les gardes et gentilshommes de la chambre, et tous deux supportaient avec répugnance le fardeau et l’odieux de leurs chaînes. Leur sœur avait épousé le prince Louis de Würtemberg, frère de l’impératrice régnante. De mauvais traitements, et plus encore la trahison du prince dans notre campagne de 1792, avaient obligé la princesse à divorcer avec lui ; ce fut là un grief et une des sources de toutes les persécutions exercées contre cette famille.

Le dimanche suivant fut destiné à notre présentation à l’empereur et à l’impératrice. D’après