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ÉLARGISSEMENT.

en arrangeant dans ma tête le plan de ma vie dans un désert glacé ; je comptais combien d’argent j’avais dans ma poche, et trouvant à peu près trente ducats en or, de crainte d’être fouillé, je les glissais sous ma chemise ; enfin, j’attendais l’événement. Cependant une heure, deux heures se passent, la nuit arrive, et son Excellence n’étant pas encore de retour, on me laisse au milieu des ténèbres et en proie à toutes sortes d’inquiétudes, jusqu’à ce qu’au bout du compté on vint me chercher, et on m’introduisit dans son cabinet de travail. « C’est vous, Monsieur, me dit-il, que l’empereur vient d’élargir tout à l’heure ? » — « Oui , lui dis-je. » — « Et de nouveau, Monsieur, vous encourez sa disgrâce. » — « Par quel moyen, lui dis-je, comment ? » — « Sans la permission de la cour, vous avez été rendre visite à une des dames d’honneur. » — « Où et quand ? lui dis-je ; je ne vais nulle part, excepté chez mes amis, et je n’ai pas l’honneur de connaître aucune des dames dont vous me parlez ; permettez-moi de vous demander son nom ? » — « Il ne s’agit pas de çà, me dit-il ; mais enfin l’empereur vous pardonne cette fois-ci, et moi je vous donne le conseil, de ne pas rester trop longtemps à Pétersbourg. Adieu. » Je remontai en voiture et revins chez le général Kosciuszko ; je lui conte mon aventure, et j’ajoute qu’il faut