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ITINÉRAIRE DES CAPTIFS

plus grande intimité. Zoritz se dérobe souvent à ses courtisans et court chez Korsakow, qui vit plus retiré. Là, enfermés, tête à tête, n’ayant pour témoin qu’un vase de punch, ils passent des nuits à médire des favoris présents, à parler de leur félicité passée, et à se communiquer des particularités et des anecdotes sur le boudoir de l’impératrice ; anecdotes assez nombreuses, s’ils les écrivaient, pour faire un gros supplément aux amours des douze Césars.

Ce fut, je crois, entre Orsza et Witebsk que le capitaine Udom nous rejoignit de son voyage secret à Varsovie, Nous l’attendions tous avec impatience, quoique par des motifs différents. L’espoir de recevoir des secours et des nouvelles des nôtres, l’idée que ses remontrances modéreraient Titow dans ses cruautés, nous faisaient désirer ardemment son retour. Le major, de son côté, comptait tous les instants qui devaient lui ramener sa Yewuszka, l’objet de son amour, de son estime et de toute sa tendresse. Quels furent donc son étonnement, sa douleur, sa rage, lorsqu’il vit arriver Udom sans sa maîtresse, et lorsqu’il apprit de lui que sa chère Yewuszka, s’étant emparée de tous ses effets, avait décampé de Varsovie, on ne savait pas où ! Aussitôt le modèle de toutes les vertus, de toutes les grâces, fut chargé par notre major des épithètes les plus in-