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AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA

lonté prisonnière, elle aussi, se délivre avec folie.

Que le temps ne recule pas, c’est là sa colère ; « ce qui fut » — ainsi s’appelle la pierre que la volonté ne peut soulever.

Et c’est pourquoi, par rage et par dépit, elle soulève des pierres et elle se venge de celui qui n’est pas, comme elle, rempli de rage et de dépit.

Ainsi la volonté libératrice est devenue malfaisante ; et elle se venge sur tout ce qui est capable de souffrir de ce qu’elle ne peut revenir elle-même en arrière.

Ceci, oui ceci seul est la vengeance même : la répulsion de la volonté contre le temps et son « ce fut ».

En vérité, il y a une grande folie dans notre volonté ; et c’est devenu la malédiction de tout ce qui est humain que cette folie ait appris à avoir de l’esprit !

L’esprit de la vengeance : mes amis, c’est là ce qui fut jusqu’à présent la meilleure réflexion des hommes ; et, partout où il y a douleur, il devrait toujours y avoir châtiment.

« Châtiment », c’est ainsi que s’appelle elle-même la vengeance : avec un mot mensonger elle simule une bonne conscience.

Et comme chez celui qui veut il y a de la souffrance, puisqu’il ne peut vouloir en arrière, — la volonté elle-même et toute vie devraient être — punition !

Et ainsi un nuage après l’autre s’est accumulé sur