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AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA

nais, — je le connais aussi, ce lutin que j’aime malgré moi, ce Zarathoustra : il me semble le plus souvent semblable à une belle larve de saint,

— semblable à un nouveau déguisement singulier, où se plaît mon esprit mauvais, le démon de mélancolie : — souvent il me semble que j’aime Zarathoustra à cause de mon mauvais esprit. —

Mais déjà il s’empare de moi et il me terrasse, ce mauvais esprit, cet esprit de mélancolie, ce démon du crépuscule : et en vérité, ô hommes supérieurs, il est pris d’une envie —

— ouvrez les yeux ! — il est pris d’une envie de venir nu, en homme ou en femme, je ne le sais pas encore : mais il vient, il me terrasse, malheur à moi ! ouvrez vos sens !

Le jour baisse, pour toutes choses le soir vient maintenant, même pour les meilleures choses ; écoutez donc et voyez, ô hommes supérieurs, quel démon, homme ou femme, est cet esprit de la mélancolie du soir !

Ainsi parlait le vieil enchanteur, puis il regarda malicieusement autour de lui et saisit sa harpe.


3.


Dans l’air clarifié,
quand déjà la consolation de la rosée
descend sur terre,
invisible, sans qu’on l’entende,
— car la rosée consolatrice porte