Page:Nietzsche - Ainsi parlait Zarathoustra (trad. Albert, 1903).djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
52
AINSI PARLAIT ZARATHOUSTRA

dis : son âme voulait du sang, et ne désirait point le vol : il avait soif du bonheur du couteau !

Mais sa pauvre raison ne comprit point cette folie et c’est elle qui décida le criminel. « Qu’importe le sang ! dit-elle ; ne veux-tu pas profiter de ton crime pour voler ? pour te venger ? »

Et il écouta sa pauvre raison : son discours pesait sur lui comme du plomb, — alors il vola, après avoir assassiné. Il ne voulait pas avoir honte de sa folie.

Et de nouveau le plomb de sa faute pèse sur lui, de nouveau sa pauvre raison est si engourdie, si paralysée, si lourde.

Si du moins il pouvait secouer la tête, son fardeau roulerait en bas : mais qui secouera cette tête ?

Qu’est cet homme ? Un monceau de maladies qui, par l’esprit, agissent sur le monde extérieur : c’est là qu’elles veulent faire leur butin.

Qu’est cet homme ? Une grappe de serpents sauvages entrelacés, qui rarement se supportent tranquillement — alors ils s’en vont, chacun de son côté, pour chercher leur butin de par le monde.

Voyez ce pauvre corps ! Ses souffrances et ses désirs, sa pauvre âme essaya de les comprendre, — elle crut qu’ils étaient le plaisir et l’envie criminelle d’atteindre le bonheur du couteau.

Celui qui tombe malade maintenant est surpris par le mal qui est le mal de ce moment : il veut faire souffrir avec ce qui le fait souffrir. Mais il y a eu