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Page:Nietzsche - Aurore.djvu/24

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AURORE

13.

Pour l’éducation nouvelle du genre humain. — Collaborez à une œuvre, vous qui êtes secourables et bien pensants : aidez à éloigner du monde l’idée de punition qui partout est devenue envahissante ! Il n’y a pas mauvaise herbe plus dangereuse ! On a introduit cette idée, non seulement dans les conséquences de notre façon d’agir — et qu’y a-t-il de plus néfaste et de plus déraisonnable que d’interpréter la cause et l’effet comme cause et comme punition ! — Mais on a fait pis que cela encore, on a privé les événements purement fortuits de leur innocence en se servant de ce maudit art d’interprétation par l’idée de punition. — On a même poussé la folie jusqu’à inviter à voir dans l’existence elle-même une punition. — On dirait que c’est l’imagination extravagante des geôliers et des bourreaux qui a dirigé jusqu’à présent l’éducation de l’humanité !

14.

Signification de la folie dans l’histoire de l’humanité. — Si, malgré ce formidable joug de la moralité des mœurs, sous lequel toutes les sociétés humaines ont vécu, si — durant des milliers d’années avant notre ère, et encore au cours de celle-ci jusqu’à nos jours (nous habitons nous-mêmes, dans un petit monde d’exception et en quelque sorte dans la zone mauvaise) — les idées nouvelles et divergentes, les appréciations et les instincts contraires