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AURORE


438.

L’homme et les choses. — Pourquoi l’homme ne voit-il pas les choses ? Il se trouve lui-même dans le chemin : il cache les choses.

439.

Signes distinctifs du bonheur. — Toutes les sensations de bonheur ont deux choses en commun, la plénitude du sentiment et la pétulance qui en résulte ; en sorte que l’on se sent dans son élément comme un poisson dans l’eau et que l’on s’y agite. De bons chrétiens comprendront ce que c’est que l’exubérance chrétienne.

440.

Ne point abdiquer ! — Renoncer au monde sans le connaître, comme une nonne, — c’est aboutir à une solitude stérile, peut-être mélancolique. Cela n’a rien de commun avec la solitude de la vie contemplative chez le penseur : lorsqu’il choisit cette solitude il ne veut nullement renoncer ; ce serait tout au contraire pour lui du renoncement, de la mélancolie, la destruction de soi-même, de devoir persister dans la vie pratique : il renonce à celle-ci, puisqu’il la connaît, puisqu’il se connaît. C’est ainsi qu’il fait un bond dans son eau, c’est ainsi qu’il gagne sa sérénité.

441.

Pourquoi le prochain devient pour nous de plus