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AURORE

reaux de leur cage, bondissant contre ces barreaux pour essayer de les briser ; et bienheureux semblait être celui qui, à travers un interstice, croyait voir quelque chose du dehors, de l’au-delà et du lointain.

45.

Un dénouement tragique de la connaissance. — De tous les moyens d’exaltations ce sont les sacrifices humains qui, de tous temps, ont le plus élevé et spiritualisé l’homme. Et peut-être y a-t-il une seule idée prodigieuse qui, maintenant encore, pourrait anéantir toute autre aspiration, en sorte qu’elle remporterait la victoire sur le plus victorieux, — je veux dire l’idée de l’humanité qui se sacrifie. Mais à qui devrait-elle se sacrifier ? On peut déjà jurer que, si jamais la constellation de cette idée apparaît à l’horizon, la connaissance de la vérité demeurera le seul but énorme à quoi un pareil sacrifice serait proportionné, parce que pour la connaissance aucun sacrifice n’est trop grand. En attendant le problème n’a jamais été posé, on ne s’est jamais demandé en quel sens sont possibles des démarches pour encourager l’humanité dans son ensemble ; et moins encore quel serait l’instinct de connaissance qui pousserait l’humanité à s’offrir elle-même en holocauste pour mourir avec dans les yeux la lumière d’une sagesse anticipée. Peut-être que lorsque l’on sera parvenu à fraterniser avec les habitants d’autres planètes, en vue de parvenir à la connaissance, et que, pen-