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HUMAIN, TROP HUMAIN


Alors peut-être jaillira en flamme, comme d’une étincelle écartée en son vol de la terrible énergie ainsi allumée, tout d’un coup la lueur du génie ; la volonté, comme un coursier rendu furieux par l’éperon du cavalier, éclatera alors et bondira sur un autre domaine. — Qui viendrait à la pleine conscience sur la production du génie et voudrait réaliser pratiquement le procédé que la nature y emploie d’ordinaire devrait être juste aussi méchant et sans scrupule que la nature. — Mais peut-être nous sommes-nous mal entendus.

234.

Valeur de la mi-chemin. — Peut-être la production du gcnie n’est-elle réservée qu’à une période de temps limitée de l’humanité. Car on ne peut attendre encore de l’avenir de l’humanité tout ce que les conditions très déterminées de n’importe quel passé pouvaient seules produire ; par exemple, les étonnants effets du sentiment religieux. Celui-ci même a eu son temps et beaucoup de très bonnes choses ne peuvent plus seproduire, parce que de lui seul elles pouvaient se produire. Ainsi il n’existera plus désormais un horizon de vie et de civilisation borné par la religion. Peut-être même le type du saint n’est-il possible que dans une certaine servitude de l’intelligence, dont, à ce qu’il semble, c’en est fait pour tout l’avenir. Et de même la supériorité de