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HUMAIN, TROP HUMAIN


249.

Souffrir du passé de la civilisation. — Qui s’est fait une idée claire du problème de la civilisation souffre alors d’un sentiment analogue à celui qui a hérité d’une richesse acquise par des moyens illégaux, ou comme le prince qui règne par les violences de ses ancêtres. Il pense avec chagrin à son origine et souvent sent de la honte, souvent de l’excitation. La somme entière de force, de volonté de vivre, de plaisir, qu’il applique à sa propriété, est souvent balancée par une profonde lassitude : il ne peut oublier son origine. L’avenir lui apparaît mélancolique : ses descendants, il le prévoit, souffriront du passé comme lui.

250.

Manières. — Les bonnes manières disparaissent à mesure que l’influence de la cour et d’une aristocratie fermée perd du terrain : on peut observer clairement cette décroissance de siècle en siècle, si l’on a des yeux pour les actes publics : le fait est qu’ils deviennent visiblement de plus en plus populaciers. Personne ne sait plus rendre hommage et flatter d’une façon spirituelle ; de là provient ce fait ridicule, que dans des cas où l’on doit présentement offrir des hommages (par exemple à un grand homme d’État ou à un grand artiste) on