Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/204

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bien plus élevé, l’assujettissement violent et cruel de la raison : une volupté qui atteint son comble, lorsque le mépris ascétique de la raison qui impitoyablement se nargue elle-même décrète : « il y a un domaine de la vérité et de l’être, mais précisément la science en est exclue ! »… (Soit dit en passant : dans le concept kantien du « caractère intelligible des choses » il est resté des traces de cette division dont les ascètes se font une joie, de cette division qui aime à tourner la raison contre la raison : en effet le « caractère intelligible » chez Kant correspond à une espèce de complexion des choses dont l’intellect comprend tout juste assez pour se rendre compte que pour l’intellect elle est — absolument inintelligible.) — Toutefois, en notre qualité de chercheurs de la connaissance, ne soyons pas ingrats envers de tels renversements des perspectives et des appréciations habituelles avec quoi l’esprit a trop longtemps fait rage contre lui-même, inutilement en apparence et d’une façon sacrilège : mais voir autrement, vouloir voir autrement n’est pas une médiocre discipline, une défectueuse préparation de l’intellect à sa future « objectivité » celle-ci de « contemplation désintéressée » (c’est là un non-sens, une absurdité), mais comme faculté de tenir en