Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/214

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sacro-saint de la science il voudrait se faire entendre, ce rauque aboiement indigné des chiens maladifs, la rage haineuse, l’esprit de mensonge de ces nobles pharisiens (— je rappelle encore une fois aux lecteurs qui ont des oreilles ce Berlinois, apôtre de la vengeance, Eugène Dühring qui, dans l’Allemagne contemporaine, fait l’usage le plus immodéré et le plus déplaisant du tam-tam moral : Dühring, le plus grand hâbleur moral de notre époque, même parmi ses pareils, les antisémites). Ce sont tous hommes du ressentiment, ces disgraciés physiologiques, ces vermoulus, il y a là une puissance frémissante de vengeance souterraine, insatiable, inépuisable dans ses explosions contre les heureux, ingénieux dans les travestissements de la vengeance, dans les prétextes à exercer la vengeance. Quand parviendront-ils au triomphe sublime, définitif, éclatant de cette vengeance ? — Alors, indubitablement, quand ils arriveront à jeter dans la conscience des heureux leur propre misère et toutes les misères : de sorte qu’un jour ceux-ci commenceraient à rougir de leur bonheur et à se dire peut-être les uns aux autres : « Il y a une honte à être heureux, en présence de tant de misères ! »… Mais quelle erreur plus grande et plus néfaste que