Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/276

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à cornes » d’un peuple (— s’il n’est pas de hâblerie intellectuelle qui dans l’Allemagne d’aujourd’hui n’obtienne quelque succès, cela tient à l’indéniable et déjà manifeste appauvrissement de l’esprit allemand, appauvrissement dont je cherche la cause dans une nourriture trop exclusivement composée de journaux, de politique, de livre et de musique wagnérienne ; à quoi il faut ajouter encore les causes qui expliquent le choix même d’un tel régime : l’exclusivisme et la vanité nationale, le principe fort mais étroit : « l’Allemagne, l’Allemagne par-dessus tout », ensuite aussi la paralysie agitante des « idées modernes »). L’Europe d’aujourd’hui est riche avant tout en excitants ; il semble que rien ne lui soit plus indispensable que les stimulants et les eaux-de-vie : de là aussi cette vaste falsification de l’idéal, cette eau-de-vie de l’esprit ; de là aussi cette atmosphère répugnante, empestée, chargée de mensonge et de pseudo-alcool, que l’on respire partout. Je voudrais savoir combien de cargaisons d’idéalisme en toc, de travestissements héroïques, de crécelles grandiloquentes, combien de tonnes de sympathie édulcorées et alcoolisées (— raison sociale : « la religion de la souffrance »), combien de paires d’échasses pour « noble indignation » à