Page:Nietzsche - La Généalogie de la morale.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

faction d’exercer, en toute sécurité, sa puissance sur un être réduit à l’impuissance, la volupté « de faire le mal pour le plaisir de le faire », la jouissance de tyranniser : et cette jouissance est d’autant plus vive que le rang du créancier sur l’échelle sociale est plus bas, que sa condition est plus humble, car alors le morceau lui paraîtra plus savoureux et lui donnera l’avant-goût d’un rang social plus élevé. Grâce au châtiment infligé au débiteur, le créancier prend part au droit des maîtres : il finit enfin, lui aussi, par goûter le sentiment anoblissant de pouvoir mépriser et maltraiter un être comme quelque chose qui est « au-dessous de lui » — ou, du moins dans le cas où le vrai pouvoir exécutif et l’application de la peine ont déjà été délégués à l’ « autorité », de voir du moins mépriser et maltraiter cet être. La compensation consiste donc en une assignation et un droit à la cruauté. —

6.

C’est dans cette sphère du droit d’obligation que le monde des concepts moraux « faute », « conscience », « devoir », « sainteté du devoir » a son foyer d’origine ; — à ses débuts, comme tout ce qui