Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/233

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moralistes, veulent se rendre maîtres de la morale instinctive des fortes races et des époques vigoureuses sont : 1) Les instincts des faibles et des déshérités. 2) Les instincts des exceptions, des solitaires, des déracinés, de l’abortus en grand et en petit. 3) Les instincts de ceux qui souffrent habituellement, qui ont besoin d’une interprétation noble de leur état et qui, pour cela, doivent être physiologistes aussi peu que possible.

169.

La morale comme tentative d’établir la fierté humaine. — La théorie du " libre arbitre " est antireligieuse. Elle veut créer à l’homme un droit de se prendre pour cause de ses conditions et de ses actes supérieurs : elle est une forme du sentiment de fierté croissante. L’homme sent sa puissance, son " bonheur ", comme on dit : il faut bien qu’en face de cet état sa "volonté" soit en jeu, autrement elle ne lui appartiendrait pas. La vertu c’est la tentative de considérer un fait de la volonté, dans le présent, ou dans le passé, comme un antécédent nécessaire à chaque sentiment de bonheur élevé et intense : si la volonté de certains actes est régulièrement présente dans la conscience, on peut prévoir qu’un sentiment de puissance en sera l’effet, — C’est là une simple optique de la psychologie : avec toujours la fausse suppos