Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/270

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e " (comme s’il détenait celle-ci) : comme si la raison, le goût, la vertu étaient combattus par son adversaire… La foi dont il a besoin, comme le moyen de défense et d’agression le plus fort qu’il y ait, est la foi en lui-même, mais mal interprétée sous le nom de foi en Dieu. — Il n’imagine jamais les avantages et les utilités de la victoire, mais toujours seulement la victoire à cause de la victoire, sous le nom de " victoire de Dieu "-. Toute petite communauté (et même tout individu) se trouvant en lutte cherche à se convaincre de ceci : " Nous avons le bon goût, le bon jugement et la vertu de notre côté… " La lutte oblige à une pareille exagération de l’estime de soi.

204.

Toute société a la tendance de réduire ses adversaires jusqu’à la caricature - du moins dans son imagination - et de les affamer en quelque sorte. Une pareille caricature c’est, par exemple, notre " criminel ". Au milieu du régime aristocratique de l’Empire romain, le juif était réduit à la caricature. Parmi les artistes, c’est " M. Prud’homme " et le " bourgeois " ; parmi les gens pieux, l’impie ; parmi les aristocrates, l’homme du peuple. Parmi les immoralistes, le moraliste devient une caricature : c’est pour moi, par exemple, le cas de Pl