Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 2.djvu/159

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rendu maître de ce qui est laid et épouvantable; ou en ce sens qu'il excite légèrement en nous le plaisir de la cruauté (dans certaines circonstances même le plaisir de nous faire mal à nous-mêmes, les violences sur notre propre personne: et de la sorte le sentiment de la puissance sur nous-mêmes).

362.

Pessimisme en art ? - L'artiste se met peu à peu à aimer pour eux-mêmes les moyens par quoi se manifeste l'état d'ivresse: l'extrême finesse et la splendeur des couleurs, la netteté des lignes, la nuance dans le ton: ce qui distingue alors que généralement, dans ce qui est normal, toute distinction fait défaut. Toutes les choses distinctes, toutes les nuances, en tant qu'elles font souvenir des extrêmes tensions de forces qui provoquent l'ivresse, éveillent en sens inverse ce sentiment d'ivresse; l'effet de l'œuvre d'art, c'est de provoquer l'état propre à créer l'œuvre d'art, c'est de susciter l'ivresse.

Ce qui est essentiel dans l'art, c'est la perfection de l'être, l'achèvement, l'acheminement vers la plénitude; l'art est essentiellement l'affirmation, la bénédiction, la divinisation de l'existence... Quel est le sens d'un art pessimiste ?... N'y a-t-il pas là une contradiction ? - Certainement. - Schopenhauer se trompe lorsqu'il place certaines parties de l'art au service du pessimisme. La tragé