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Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 2.djvu/172

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373.

Le nihilisme des artistes. - La nature est cruelle par sa sérénité; cynique avec ses rayons de soleil. Nous sommes les adversaires des émotions sentimentales. On fuit là-bas où la nature émeut nos sens et notre imagination, où nous n'avons rien à aimer, où l'on ne nous fait pas souvenir des apparences et des délicatesses morales de cette nature nordique - et il en est de même des arts. Nous préférons ne plus nous souvenir du " bien " et du " mal ". Notre irritabilité morale et notre capacité de souffrir sont comme fondues dans une nature terrible et heureuse, dans le fatalisme des sens et des forces. La vie sans bonté.

Ce qu'il y a de bienfaisant, c'est de contempler la grandiose indifférence de la nature vis-à-vis du bien et du mal.

Nulle justice dans l'histoire, nulle bonté dans la nature; c'est pourquoi le pessimiste, pour le cas où il serait artiste, dans l'histoire, irait de préférence aux époques où l'absence de la justice se montre encore avec une naïveté grandiose, où la perfection trouve justement son expression -, et de même dans la nature, il irait là-bas où le caractère méchant et indifférent ne se cache pas, où la nature elle-même représente un caractère de perfection... L'artiste nihiliste se révèle dans sa volonté et sa préférence de l'histoire cynique, de la nature cynique.

374.