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Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 2.djvu/280

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d'un bonheur blasphématoire. Passer sa vie parmi les choses tendres et absurdes; étranger à la réalité; moitié artiste, moitié oiseau et métaphysicien; sans oui ni non pour la réalité, si ce n'est pour la reconnaître de temps en temps, à la façon des bons danseurs avec la pointe des pieds; toujours chatouillé par un rayon de soleil du bonheur; encouragé et vivifié même par le malheur - car le malheur conserve l'homme heureux - ; accrochant même à ce qu'il y a de plus saint une petite queue de bouffonnerie: - cela est, comme il va de soi, l'idéal d'un esprit lourd, d'un esprit qui pèse un quintal, l'idéal d'un esprit de lourdeur.

482.

Il s'entend que seuls les hommes les plus rares et les mieux venus arrivent aux joies humaines les plus hautes et les plus altières, alors que l'existence célèbre sa propre transfiguration: et cela aussi seulement après que leurs ancêtres ont mené une longue vie préparatoire en vue de ce but qu'ils ignoraient même. Alors une richesse débordante de forces multiples, et la puissance la plus agile d'une " volonté libre " et d'un crédit souverain habitent affectueusement chez un même homme; l'esprit se sent alors à l'aise et chez lui dans les sens, tout aussi bien que les sens sont à l'aise et chez eux dans l'esprit; et tout ce qui se déroule dans celui-ci doit aussi se fondre en ceux-là, dans un jeu subtil