Page:Nietzsche - Le Gai Savoir, 1901.djvu/254

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y avoir beaucoup de mépris de soi-même et de misères secrètes dans l’histoire des plus grands esprits.

297.

Savoir contredire. — Chacun sait maintenant que c’est un signe de haute culture que de savoir supporter la contradiction. Quelques-uns savent même que l’homme supérieur désire et provoque la contradiction pour avoir sur sa propre injustice des indications qui lui étaient demeurées inconnues jusqu’alors. Mais savoir contredire, le sentiment de la bonne conscience dans l’hostilité contre ce qui est habituel, traditionnel et sacré, — c’est là, plus que le reste, ce que notre culture possède de vraiment grand, de nouveau et de surprenant, c’est le progrès par excellence de tous les esprits libérés : qui est-ce qui sait cela ?

298.

Soupir. — J’ai saisi cette idée en passant, et vite j’ai pris les premiers mots venus pour la fixer, de crainte qu’elle ne s’envole de nouveau. Et maintenant elle est morte de ces mots stériles ; elle est là suspendue, flasque sous ce lambeau verbal — et, en la regardant, je me rappelle à peine encore comment j’ai pu avoir un tel bonheur en attrapant cet oiseau.

299.

Ce qu’il faut apprendre des artistes. — Quels