elle-même qui avait amassé la force jusqu’à l’énormité, qui avait tendu l’arc d’une façon si menaçante ; maintenant elle est surmontée, elle a « vécu ». Le point périlleux et inquiétant est atteint, où la vie plus grande, plus multiple, plus vaste, l’emporte sur la vieille morale ; « l’individu » est là, forcé à se donner à lui-même des lois, à avoir son art propre et ses ruses pour la conservation, l’élévation et l’affranchissement de soi. Rien que de nouveaux pourquoi et de nouveaux comment ? plus de formules générale, des méprises et des mépris ligués ensemble, la chute, la corruption et les désirs les plus hauts joints et épouvantablement enchevêtrés, le génie de la race débordant de toutes les coupes du bien et du mal, une simultanéité fatale de printemps et d’automne, pleine d’attrait nouveaux et de mystères, propres à la corruption jeune, point encore épuisée et lassée. De nouveau, le danger se présente, le père de la morale, le grand danger, cette fois transporté dans l’individu, dans le proche et dans l’ami, dans la rue, dans son propre enfant, dans son propre cœur, dans tout ce qui est le plus propre et le plus mystérieux en fait de désirs et de volontés. Les moralistes qui arrivent en ce temps qu’auront-ils à prêcher ? Ils découvriront, ces subtils observateurs debout au coin des rues, que c’en est bientôt fait, que tout autour d’eux se corrompt et corrompt, que rien ne dure jusqu’au surlendemain, une seule espèce d’hommes exceptée, l’incurable-
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QU’EST-CE QUI EST NOBLE ?