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PAR DELÀ LE BIEN ET LE MAL


42.

Une nouvelle race de philosophes se lève. J’ose la baptiser d’un nom qui n’est pas sans danger. Tels que je les devine, tels qu’ils se laissent deviner — car il est dans leur nature de vouloir rester quelque peu énigmes, — ces philosophes de l’avenir voudraient avoir, justement et peut-être aussi injustement — un droit à être appelés des séducteurs. Lancer ce qualificatif ce n’est peut-être, en fin de compte, qu’une tentative et, si l’on veut, une tentation.

43.

Seront-ils de nouveaux amis de la « vérité », ces philosophes de l’avenir ? Sans doute, car tous les philosophes ont, jusqu’à présent, aimé leur vérité. Mais certainement ce ne seront pas des dogmatiques. Ce serait contraire à leur fierté et irait aussi contre leur goût si leur vérité devait être une vérité pour tout le monde, ce qui fut jusqu’à présent le secret désir et la pensée de derrière la tête de toutes les aspirations dogmatiques. « Mon jugement, c’est mon jugement à moi : un autre ne me semble pas y avoir droit — ainsi s’exprimera peut-être un de ces philosophes de l’avenir. Il faut se garder du mauvais goût d’avoir des idées communes avec beaucoup de gens. « Bien » n’est plus bien dès que le voisin l’a en bouche. Et comment, se pourrait-il