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blent vouloir se séparer violemment et suivre des directions différentes. Peu-à-peu nous voyons leur mouvement devenir plus fort et plus rapide ; l’agitation convulsive est absorbée dans le calme imposant d’une marche incessante vers un but encore inconnu ; et tout-à-coup, vers la fin, le large fleuve, dans toute sa force, se précipite vers l’abîme avec un désir fatal du gouffre et de ses fureurs. Jamais Wagner n’est plus lui-même que lorsque les difficultés s’accumulent et qu’il peut agir dans des conditions gigantesques avec la noble joie du législateur. Transformer en rythmes d’une grande simplicité des éléments déréglés et rebelles, réaliser une volonté unique au milieu d’une multitude étourdissante de prétensions et d’exigences — tels sont les devoirs pour lesquels il se sent né, dans l’exercice desquels il a la conscience de sa liberté. Pour eux, jamais les forces ne lui manquent ; jamais il n’ar-