— Elle en avait une, monsieur le président ; mais… je l’aime beaucoup… beaucoup, répéta-t-elle d’une voix profonde et un peu solennelle.
— Comment, alors, faites-vous cadrer cette grande affection avec le crime horrible dont vous êtes accusée ? Comment n’avez-vous pas respecté la fille dans le père ? Comment avez-vous privé cette enfant de son appui naturel le plus fort et le plus puissant ?
Marianne ne répondit pas.
— Quel jour M. de Sauvetat est-il tombé malade ?
— Le 12 décembre.
— Combien de temps a duré sa maladie ?
— Dix-huit jours.
— Quel médecin a-t-on fait appeler ?
— M. Delorme, le médecin ordinaire la famille.
— Étiez-vous présente à sa première visite ?
— J’étais là.
— Qui a soigné M. de Sauvetat ? Qui préparait les tisanes ?
— Moi, Monsieur.
Cette réponse fut faite avec un accent si vrai et si tranquille, que l’auditoire entier comprit que ce n’était pas une coupable qui l’avait faite.
— Ainsi, personne ne l’approchait que vous ?
— À diverses reprises, mon tuteur a exigé que je prisse quelques instants de repos. Madame de Sauvetat couchait alors sur un canapé lorsque ses forces ne lui permettaient pas de me remplacer entièrement.
— Vos absences ont-elles été nombreuses ?
— Au commencement de la maladie, elles ont dû se renouveler quelquefois, car j’étais moi-même très souffrante ; à la fin, je n’ai jamais quitté M. de Sauvetat.
— Le malade vomissait-il beaucoup et fréquemment ?