Page:Ninous - L Empoisonneuse.pdf/398

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Marianne devint toute blanche, son cœur se serra à se briser, une angoisse profonde la bouleversa : d’un coup, sans qu’il y eût à y revenir, elle venait de deviner la nature de la femme perverse et vicieuse, égoïste et perfide, à laquelle son frère avait confié son nom.

Un soir, madame d’Auvray se trouvant plus faible, pria Marianne d’aller lui chercher sa fille.

Il était tard. M. de Sauvetat, harassé d’une journée passée tout entière à la campagne, était déjà couché. Blanche, étendue sur sa chauffeuse, lisait au coin du feu. Il y avait quatre jours qu’elle n’avait vu sa mère.

En entrant chez sa belle-sœur, la jeune fille était extrêmement émue.

— Madame d’Auvray est à la dernière extrémité, dit-elle ; elle te demande ; viens, elle ne passera peut-être pas la nuit.

Blanche laissa tomber son livre.

— Voyez-vous cette petite tête sauvage ! comme elle se monte ! fit-elle d’un air enjoué. Allons, chère enfant, pas d’exagérations : le docteur affirme que l’état de ma mère n’a rien d’alarmant.

— Tu te trompes, Blanche ; elle est bien, bien mal, je te l’assure. Elle respire à peine. Viens la voir, je t’en supplie.

— Je m’en garderai bien. C’est probablement une faiblesse passagère comme celle de l’autre jour ; dans tous les cas, serait-ce plus grave, je n’irais certainement pas m’exposer à éprouver une émotion qui pourrait me tuer. Je monterai demain.

— Et s’il est trop tard ?

— Ne me fatigue pas ce soir, dit-elle, laisse-moi.

Marianne comprit que toute insistance devenait inutile ; elle rejoignit la malade, contenant à peine