Page:Noël - Fin de vie (notes et souvenirs).djvu/59

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Je commençai ainsi de comprendre combien les plantes peuvent être modifiées par le changement de milieu. Je fis, dans mon propre jardin, des essais, qui me démontrèrent mieux encore à quel point la vie végétale est malléable.

Lorsque, vers cette époque, il fut question devant moi des aperçus de Lamark sur le transformisme, lorsque je lus dans Buffon, à l’article pigeon, que les animaux, eux aussi, sont à volonté modifiables, je me rappelai cette influence modificatrice du milieu observée dans le jardin de MM. Germain.

Voilà les souvenirs qui, ce matin, me revenaient, pendant que j’étais près du feu, assis sur ma chaise, immobile et silencieux, comme les vieillards de mon enfance, il y a soixante-dix ans.

Le Temps publiait ces jours derniers l’histoire d’un très pauvre diable, honnête et doux, serviable, irréprochable de conduite, qui, plusieurs fois, s’est vu mettre en prison pour vagabondage ; qui, étant soldat, s’est fait condamner comme déserteur, parce que de temps en temps il est pris du besoin irrésistible, aveugle, de s’en aller, marchant droit devant lui, infatigablement ; il fait en moyenne, dans ses crises, soixante-dix kilomètres par jour. Il a visité ainsi