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NOA NOA

IV

Les Dieux sont mort, et Tahiti meurt de leur mort.
Le soleil autrefois qui enflammait l’endort
D’un sommeil désolé d’affreux sursauts de rêve,
Et l’effroi du futur emplit les yeux de l’Eve
Dorée : elle soupire en regardant son sein,
Or stérile scellé par les divins desseins.

Les Dieux sont morts. — Mais quand, sur son char de ténèbres,
Le Soir, pourpre d’amours et de meurtres célèbres,
Apparaît, pourchassant le Soleil furieux,
Du fond de leur tombeau se relèvent les Dieux
Qui, sur la cime, en un formidable concile,
Durant toute la nuit demeurent, immobiles,
Les bras dardés vers la mer. Et, du haut du mont,
Par milliers vers la grève essaiment les démons,