Page:Noailles - La Nouvelle Espérance, 1903.djvu/72

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la main sur le bras, je vous défends de jeter cette carte, c’est trop bête, reprenez-la.

Et lui, surpris, embarrassé, riant ensuite, la regardait dans son beau visage de joie.

Les journées passaient, écourtées par les perpétuelles rencontres, chauffées par l’interprétation silencieuse des paroles et des regards. Sabine était contente, elle ne pensait pas à autre chose qu’à cela : qu’elle était contente. Elle se disait : « Ce garçon est amoureux de moi », et ces mots faisaient devant elle comme une pluie de soleil derrière quoi rien n’était plus visible.

Elle vivait précipitamment, s’habillant, sortant, riant, recommençant.

Le soir, quand Jérôme se mettait au piano et chantait, elle en éprouvait un tel orgueil qu’elle craignait que cela ne parût sur son visage, et elle s’asseyait contre la lampe.

Quand elle lui demandait : « Chantez cela », et que Marie disait : « Non, cet autre morceau », Sabine la regardait avec un étonnement naïf et fâché, comme si la jeune fille s’était arrogé un droit de désir qui désormais n’appartenait plus qu’à elle.