Page:Noailles - La domination, 1905.pdf/137

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
130
LA DOMINATION

lez nettement et dignement, et que moi je me souviens. Je vous aime quand, dans la salle humide et pourpre de votre palais, vous vous empressez auprès du vieux gentilhomme vénitien ou des futiles dogaresses, et que, d’un regard attachant votre regard, je fais connaître à votre imagination, à votre doux corps sensuel, cet « intolérable répit » que chante le poète Swinburne, ivre d’acide volupté. Je vous aime, petite amie, quand dans l’église Santa Maria dei Miracoli, où vous alliez si chastement faire vos prières, — et qui, vous le voyez bien, est un coffret ardent et triste, une close gondole bombée, et toujours ce carnaval or et noir, — quand dans cette église je vous prends la main, et vous dis, malgré votre peur du sacrilège : « Ma chère Marie, c’est vous Sainte-Marie des Miracles, car de votre cœur, qui était un petit pain ordinaire, vous avez fait une rose brûlante… »