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LA DOMINATION

histoire poétique et familière, dont les images quotidiennes distrayaient son cœur.

Antoine Arnault travaillait ; sa grande réputation embarrassait sa vie. En quelques années il connut toutes les agitations de la politique et du succès. Il témoignait à sa femme de la tendresse, sans qu’elle sût qu’il pouvait donner davantage. Lui-même oubliait qu’il avait été un jeune héros passionné, et, après de lourdes et laborieuses journées, le cœur las mais non point soucieux, il goûtait sa paisible demeure et regardait jouer ses petites filles : « Ce sont, pensait-il, les petites filles d’Antoine Arnault ; deux garçons auraient mieux continué le sang du père, mais telles que les voilà elles sont parfaites : deux roses issues de mon cœur. »

« Croissez, songeait-il, mes enfants charmantes. Un jour, dans votre sein, la vie encore s’incarnera : un petit être nouveau, élémentaire, rude comme un dieu. Ainsi