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TUMULTE DANS L’AURORE


Le ciel est bleu, le sol est bleu, la forêt fume.
Les villages, encore endormis dans la brume
Et par tant de vapeurs du réel séparés,
Semblent les songes blancs des coteaux azurés…
Peu à peu le matin s’éveille et se précise,
On reconnaît le buis, le laurier, la cerise.
Le feuillage léger d’un hêtre immense et pur
Est tissé fil à fil sur le sublime azur,
Et luit comme un détail accompli dans l’espace…
– Le soleil, brusquement, inonde la terrasse.
Le plaisir des oiseaux est si puissant dans l’air
Que leur vol sec et noir fait un sillage clair.
Un jaune papillon vient pomper des corolles
C’est un peu de chaleur avec deux ailes molles.
L’air du matin, trop frais, n’a pas encor d’odeur,
Il n’est que mouvement, envolement, candeur ;
Mais ce qui rebondit sur cet air jeune et libre,
Ce qui vient m’envahir, me presser fibre à fibre,