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LE VALLON DE LAMARTINE

Vous descendez les escaliers
D’herbe, de pierre, à tire-d’ailes !
Ô pauvres sources infidèles,
Vous ne reverrez jamais plus
Les verts coteaux qui vous ont plu,
L’aurore si rose et si proche
Au sommet de la haute roche ;
Torrent si pressé, si hâtif
Qui semblez être le pouls vif
Du temps qui fuit, irrévocable,
Comme votre fureur m’accable,
Comme vous criez à mon corps :
« Le jour se meurt, le jour est mort !… »
Comme vous dites « Courons vite
Où le beau plaisir nous invite.
Craignons de perdre sous le ciel
Un peu de temps essentiel.
Avant, hélas ! que l’on s’enfonce
Sous la terre âpre ou sous la ronce
Ou l’onde, où l’homme sont jetés,
Epuisons les divins étés !
Le suc du cœur ou de l’écorce
Ne fuit pas avec moins de force
Vers le ravin universel
Que ce torrent continuel !… »

Hélas ! je le sais et, j’écoute
Ce galop du temps sur la route…
– Mais quel appel à l’horizon ?