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LE CALME DES JARDINS


Les jacinthes, molles et belles,
Sont de somptueuses chandelles
Qui brûlent dans le gazon pur
Leur cire de pourpre et d’azur.

Ô petite pelouse ronde,
Sein délicat et frais du monde,
Je pose ma joue et ma main
Dans ton suave et gai chemin !

De quel délice êtes-vous ointe,
Verdure épaisse, sombre, jointe !
– Le souci éclatant et droit
Comme un jaune soleil étroit

Fait tourner sa douce lumière
Sur la pelouse familière,
D’où fusent des parfums soudain
Ô cœur fleuri, cœur des jardins !

Un oiseau prend un bain rapide
Et s’échappe, touffu, liquide,
Du naïf et rond bassin d’eau
Où trempe un bouquet de roseau.

C’est un calme qu’on ne peut dire,
C’est à peine si tout respire,
C’est un bonheur tiède, engourdi,
Comme au milieu du paradis.