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JARDIN D’ENFANCE


– Que de matins passés sur les bords du lac chaud
Où flottaient, ballotées,
Miroirs glauques et doux, fruit écailleux de l’eau,
Des carpes argentées !

La bleuâtre chaleur, de ses fortes cloisons,
Pressait ma joue ardente,
Le sifflet des bateaux jetait à l’horizon
Sa plainte haletante.

La nue avait parfois tant de sainte douceur
Pour les yeux qui s’y plongent,
Que l’on pensait pouvoir appuyer sur son cœur
Ce visage des songes.

Avoir été la vie éparse sous les cieux,
L’azur, la sève, l’onde !
Hélas ! se pourrait-il que vous brisiez mes yeux,
Ô Sagesse du monde ?