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ÉLOGE DE LA ROSE

 

Les fleurs du marronnier, cônes de parfum blanc,
Vont lentement descendre
Pour entourer les pieds du Printemps indolent,
D’aromatique cendre.

Ô douceur des jardins ! beaux jardins dont le cœur
Avec l’infini cause,
Régnez sur l’univers par la force et l’odeur
De la limpide rose,

De la rose, dieu vif, petit Éros joufflu
Armé de courtes flèches,
À qui les papillons font un manteau velu
Quand les nuits sont plus fraîches.

Rose de laque rose, ô vase balancé
Où bout un parfum tendre,
Où le piquant frelon doucement convulsé
Sent son âme s’épandre,

Rose, fête divine au reflet argentin
Sur la pelouse éclose,
Orchestre de la nuit, concert dans le jardin,
Feu de Bengale rose !

Rose dont la langueur s’élève, flotte ou pend,
Tunique insaisissable,
Que ne peuvent presser les lèvres du dieu Pan
À genoux sur le sable,