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LES VIOLONS DANS LE SOIR


Quand le soir est venu, quand tout est calme enfin
Dans la chaude nature,
Voici que naît sous l’arbre et sous le ciel divin
La plus vive torture :

Sur les graviers d’argent, dans les bois apaisés
Des violons s’exaltent,
Ce sont des jets de cris, de sanglots, de baisers,
Sans contrainte et sans haltes.

Il semble que l’archet se cabre, qu’il se tord
Sur les luisantes cordes,
Tant ce sont des appels de plaisir et de mort,
Et de miséricorde !

Comme le rossignol se convulse et se plaint,
Comme le chien aboie,
L’harmonie amoureuse a des râles câlins
Et fait hurler sa joie ;