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L’IMMORTALITÉ


Je meurs, et sur mes yeux l’on baisse mes paupières
Mais tandis qu’on me met dans mon tombeau de pierres
Je vais, d’un pas furtif, souriant et dansant,
Écartant le sol noir comme un léger encens,
Le regard élargi d’espoir et d’allégresse,
Vers les antiques dieux qui régnaient sur la Grèce…
Et j’arrive, et je vois un temple, un petit bois ;
Une ronde étincelle au loin : ce sont les Mois.
La bleuâtre colline où l’aurore s’ébroue
Semble un navire avec le soleil à sa proue !
Dans cet espace d’or, de lumineux passants
Glissent, tout l’avenir de leur regard descend.
Je vois mes dieux, je suis éblouie, étonnée…
Ils me disent : « Venez, chère ombre fortunée,
Vous qui n’avez cherché que Dieu chez les humains
Reposez-vous ici, donnez vos douces mains.
Voici l’immense azur que votre ardeur appelle ;
Vous serez calme enfin, assoupie, éternelle.