Page:Noailles - Les Éblouissements, 1907.djvu/86

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA PRIÈRE DEVANT LE SOLEIL


Ma joie est un jardin dont vous êtes la rose,
Enorme soleil d’or, flamme en corolle êclose,
Héros, d’ardents regards et de flèches armé,
Soleil, mille soleils en vous seul enfermés !
Immobite splendeur dont la face tournoie
À force de plaisir, de rayons et de joie !…
Archange au seuil du jour, Soleil essentiel
Dont les rayons glissants, comme des fils de miel
Pendent dans les jardins et se tissent au lierre
Ô Soleil bourdonnant, cymbale de lumière,
Fanfare étincelante, élan de flûtes d’or,
Laissez que les deux bras levés, en quel essor !
Je vous répète un chant, infini, monotone…
Peut-être qu’autrefois Sophocle et Antigone
Vous ont d’un même amour impétueux servi ;
Mais depuis, dans le temps indolent où je vis,
À l’époque d’orgueil amer où je suis née,
Au travers de la molle et pliante journée,