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Page:Noailles - Les climats, 1924.djvu/124

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  ARLES



Mes souvenirs, ce soir, me séparent de toi ;
Au-dessus de tes yeux, de ta voix qui me parle,
De ce frais horizon d’églises et de toits,
J’entends, dans ma mémoire où frémit leur émoi,
Les hirondelles sur le ciel d’Arles !

La nuit était torride à l’heure du couchant.
Les doux cieux languissaient comme une barcarolle ;
Deux colonnes des Grecs, levant leurs bras touchants,
Semblaient une Andromaque éplorée, et cherchant
À fléchir une ombre qui s’envole !

Ce qu’un beau soir contient de perfide langueur
Ployait dans un silence empli de bruits infimes ;
Je regardais, les mains retombant sur mon cœur,
Briller ainsi qu’un vase où coule la chaleur,
Le pâle cloître de Saint-Trophime !

Une brise amollie et peinte de parfums,
Glissait, silencieuse, au bord gisant du Rhône.
Tout ce que l’on obtient me semblait importun,
Mes pensers, mes désirs, s’éloignaient un à un
Pour monter vers d’invisibles zones !