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SECONDE LETTRE
QU’ON N’ENVOIE PAS

(détresse)

Madame, je puis enfin vous offrir aujourd’hui mon amitié. Ces mots vous surprendront. Voilà bien des années, penserez-vous, qu’une tendre affection nous lie. Il est vrai que je vous ai toujours aimée avec un empressement qui, bien que sincère, dépassait le naturel, et dont j’ai souffert avec orgueil et contrition. Vous-même avez ressenti pour moi une sympathie vigilante où je voyais s’agiter parfois le mystère de la crainte, de brusques et légères révoltes, que dominait un instinctif enchaînement. Vous me recherchiez comme je vous recherchais. Si j’avais été dans l’usage de pouvoir me plaindre, c’est près de vous que j’aurais apporté ma tristesse et cherché mon secours. Vous, plus frémissante, bien qu’obscure, m’avez fait la grâce de me livrer à