le plus grossier et le plus vil est trop bon pour le couvrir. Ayez soin de placer ces étoffes somptueuses dans notre vestiaire pour quelque usage charitable auquel nous les avons réservées, car nous savons un homme de bien dont le nom est en bénédiction parmi le peuple, qui s’est toujours habillé avec une simplicité extrême, à cause de sa grande modestie, et qui relèvera encore ces riches parures par sa grâce et sa bonne mine. — Attendez, attendez, s’écria-t-il comme par réflexion, qu’est-ce donc que le coffret qui pend à cette chaîne d’un brillant métal sur la poitrine de cet infidèle ? Qu’on me le fasse voir à l’instant ! C’est qu’il est en vérité aussi remarquable par le travail que par la matière ! Si j’en juge à son poids, il doit être de l’or le plus pur ; les pierres dont il est incrusté sont si fines qu’on les croiroit dérobées à la couronne de Salomon, et la ciselure en est si délicate qu’elle ne peut avoir été travaillée que par les péris. Je me proposois, au premier abord, d’en faire présent à Fatime, la plus jeune de mes esclaves, à qui je n’ai jamais rien donné, mais je m’avise qu’il convient mieux de le conserver dans mon trésor, dont il ne sera certainement pas la pièce la moins rare. »
En achevant ces exécrables paroles, le vieux coquin passa la chaîne de mon amulette autour de son cou.
« Tu ne t’es pas trompé en tout sur la valeur de ce joyau, voleur maudit que Dieu punisse par des tourments éternels, m’écriai-je en rugissant de fureur. Le coffret que tu me ravis, c’est le talisman merveilleux qui me donnoit la connoissance de tous les trésors de la terre. Si l’impatience de ton insatiable avarice avoit pu se satisfaire des biens que je lui aurois donnés, j’aurois changé en six mois tous tes palais en or, et je t’aurois fait marcher dans tes jardins sur un sable de diamants. Il t’en auroit moins coulé de distribuer des royaumes à tes esclaves qu’il ne t’en coûte aujourd’hui de les parer d’un misérable collier d’argent faux. Meurs donc de