Page:Nodier - Dissertations philologiques et bibliographiques.djvu/129

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presque tout le mystère de l’anonyme, tels que Jehan d’Ivry, Jehan Tabourot et Nicolas de Montreulx, qui ne sont pas beaucoup moins obscurs sous leurs noms véritables que sous ceux de Riand-Jhevy, de Thoinot Arbeau et d’Ollenix de Mont-Sacré.

Mais l’anagramme étoit alors de mode, l’anagramme dont Guillaume Colletet a dit avec tant de raison :

Cet exercice monacal
Ne trouve son point vertical
Que dans une tête blessée,
Et sur Parnasse nous tenons
Que tous ces renverseurs de noms
Ont la cervelle renversée.


Les exemples en sont devenus rares dès le dix-huitième siècle, au moins dans les ouvrages sérieux, et le philosophe Telliamed, ou de Maillet, est peut-être le seul qui se soit avisé d’en maculer le frontispice d’un livre de sciences.

L’acrostiche partageoit la vogue extravagante de l’anagramme dans cette littérature jeune et fantasque, et il n’est pas plus difficile à expliquer, quand on en cherche le secret. Il consistoit pour l’ordinaire dans une pièce de vers qu’il suffit de découvrir, et dont les initiales donnent le nom de l’auteur, omis à dessein sur le titre. C’est ainsi qu’Isabeau Faulcon en a usé dans le Faulcon des dames, Gringore dans le Château de Labour, Corrozet dans le Blazon du mois de mai, Louvan Gelliot dans la Vraye-disante advocate des dames, et Mathieu Malingre, dans la Moralité de la maladie de chrétienté ; le premier au commencement de son ouvrage, et les autres à la fin, si ma mémoire ne me trompe, car j’écris fort loin de mes livres et de tous les livres possibles. Il n’y a pas de mal d’ailleurs à laisser quelque vérification à faire aux curieux qui possèdent quelques-unes de ces