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BIOGRAPHIE DES FEMMES AUTEURS.

Détache ses cheveux, de roses les couronne ;
Saisit avec transport la fleur qu’elle abandonne.
Dans ces aimables jeux ils finissent le jour,
Souriant de bonheur, d’innocence et d’amour.

Je ne puis résister au plaisir de reproduire ici cette célèbre idylle sur la violette, dont tant de recueils gracieux se sont enrichis. On sait que Delille, après l’avoir entendu lire, s’écria : « Oh ! que cela sent bon ! »

Ô fille du printemps ! douce et touchante image
D’un cœur modeste et vertueux,
Du sein des verts gazons, tu remplis ce bocage
De tes parfums délicieux.
Que j’aime à te chercher sous l’épaisse verdure
Où tu crois fuir mes regards et le jour !
Au pied d’un chêne vert qu’arrose une onde pure,
L’air embaumé m’annonce ton séjour ;
Mais ne crains pas cette main généreuse ;
Sans te cueillir j’admire ta fraicheur ;
Je ne voudrais pas être heureuse
Aux dépens même d’une fleur.
Reste sur ta tige flexible,
Jouis des beaux jours du printemps ;
Que la douce haleine des vents,
Et ces rameaux, et ce lierre sensible,
Calment pour toi les feux des rayons dévorants !
Que l’automne aussi fasse éclore
Autour de toi des rejetons nombreux !
Que de l’hiver le souffle rigoureux
S’adoucisse et t’épargne encore !
Ah ! comme ta suave odeur,
Qui parfume les airs sans dévoiler tes charmes,
Que ne puis-je, du pauvre en essuyant les larmes,
Lui dérober l’aspect du bienfaiteur !
Timide comme toi, je veux dans la retraite
Et dans l’oubli passer mes jours:
Un peu d’encens vaut-il ce trouble qui toujours
Poursuit notre gloire inquiète ?
Simple en mes goûts, de paisibles loisirs
Rendent mon âme satisfaite;
Mon nom contente mes désirs,
Puisque l’amitié le répète.