Page:Nodier - Les Femmes celebres contemporaines.pdf/42

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traduction de leurs pensées ; ils sentent qu’il leur faut de la poésie vivante, de la poésie de soleil, d’étoiles, d’infini ; alors, ils ne chantent plus qu’avec amertume les choses de la terre ; ils lèvent la tête vers le ciel, et puis ils disent : « Mon Dieu ! » Ce dégoût de la vie n’est-il pas tout palpitant dans ces vers que Lamartine adresse à Mme Tastu ?

À ces vains jeux de l’harmonie
Disons ensemble un long adieu :
Pour sécher les pleurs du génie,
Que peut la lyre ?… Il faut un Dieu !

Quelques vraies que soient les paroles du poète saint, nous supplions tous Mme Tastu de ne pas suivre son conseil : elle, dire adieu à la poésie ! elle, déposer sa baguette de fée avec laquelle elle nous bâtit des palais magiques ! Oh ! si parfois, dans les heures de chagrin et de lassitude du monde, elle se sent prête à jeter sa plume d’or, qu’elle s’en garde bien, par pitié pour le public ! Elle sait que ce public l’aime ; il lui a donné la gloire, cette splendide royauté du génie ; il a entouré son nom de rayons éclatants, et il l’a mise au nombre des poëtes qu’il distingue entre tous, comme on choisit parmi les oiseaux les rossignols et les fauvettes.

Mme Anaïs Ségalas.