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mentée. La Psyché, recueil mensuel de poésies inédites, nous fit, je crois, connaître, en 1829, le nom et les vers de Me Anais Ségalas.

Ces vers étaient faibles, il faut l’avouer : le style surtout, plus incolore qu’incorrect, trahissait l’extrême jeunesse de l’auteur ; mais çà et là des idées fraiches et nouvelles, de la grâce partout, quoique un peu enfantine, effaçaient les taches de ces pièces, qui furent remarquées par la critique. Me Ségalas écouta les conseils de manière à en profiter : elle travailla davantage ses compositions, et se préserva par degrés de cette facilité dangereuse qui est l’écueil ordinaire des débuts poétiques ; recueillie en elle-même, elle acquit une à une les qualités d’exécution qui lui manquaient ; elle se familiarisa de plus en plus avec la langue, avec le rhythme, avec la rime ; elle fortifia son style en l’ornant d’images, en l’enrichissant d’expression ; elle réussit à trouver ces alliances de mots inattendues et saisissantes qui sont, pour ainsi dire, les pierreries de la poésie française. En 1830, elle publia un petit volume de vers intitulé les Algériennes.

Quand Mme Ségalas avait commencé sa carrière de poëte, l’inspiration lui tenait lieu de modèle et de guide ; elle ne marchait que d’après les errements classiques, et les versificateurs ingénieux du dix-huitième siècle lui avaient montré le chemin ; mais dès qu’elle eut entrevu la poésie antique d’André Chénier, la poésie mystique de Lamartine, la grande poésie de Victor Hugo, elle changea de route et de but ; elle s’élança palpitante d’émulation sur les traces de ces précurseurs, elle s’efforça de s’approcher d’eux et même de les devancer. Les Méditations et les Orientales se reflètent à chaque page des Algériennes.

L’épilogue du recueil raconte la métamorphose survenue dans la poésie de Mme Ségalas, et comme ce mor-